Comme beaucoup de mammifères,
Kiba marque son territoire par dépôt d'urine et d'excréments : sur des pierres ou au bas de troncs faisant saillie en bordure de chemin. Ces marquages ont pour rôle de donner au lieu une odeur connue, et donc rassurante, ou aussi de contribuer au maintien de chaque meute à l'intérieur de son domaine par phénomène d'évitement. Il est à noter que le marquage est deux fois plus abondant en bordure du territoire que dans la zone centrale. Evitement ou simple preuve de présence ? On ne le sait pas réellement.
Kiba passe souvent pour un animal de forêt. Dans les Alpes, il peut s'installer aussi bien en lisière de forêt que dans les pierriers. Il semble en fait que l'animal ait une prédilection pour les endroits difficilement accessibles à l'homme. A l'instar du lynx,
Kiba vit dans une tanière, située le plus souvent dans un endroit ensoleillé, à proximité d'un point d'eau, généralement aménagée sous une roche inclinée, un arbre abattu, un roncier, ou un arbre creux. La tanière peut aussi être un terrier abandonné par une autre espèce et agrandi par
Kiba-oneesan (
Mme Kiba).
Kiba hurle (eh oui !). Contrairement à ce que l'on pense,
Kiba hurle quand il le veut et non exclusivement à la pleine lune. Son répertoire est varié, car de nombreuses vocalisations, à courte portée, jouent un grand rôle dans la communication à l'intérieur de la meute. Les interactions sociales s'accompagnent de nombreuses mimiques et postures, qui restent encore à expliquer et à étudier profondément pour parvenir à une bonne compréhension des échanges : queue baissée entre les pattes arrière, oreilles couchées, mouvements de la tête, etc...
Pourquoi
Kiba hurle ? Nous ne le savons pas réellement.
Kiba et sa famille hurlant ensemble, on peut penser qu'il s'agit d'un moyen de garantir la cohésion du groupe. Des voisins de
Kiba hurlant à distance des autres, ou peut de même penser que les animaux se répondent, mais aucune preuve d'une véritable communication n'a été établie. D'autres hypothèses telles que la volonté d'attirer ou de maintenir à l'écart les meutes environnantes ont été avancées, mais là encore sans aucune réelle preuve tangible. Et si
Kiba n'exprimait simplement pas autre chose que son humeur ?
Kiba est un chasseur efficace, capable d'effectuer une approche discrète d'une proie, de la poursuivre et de l'abattre de quelques coups de dents. A la belle saison,
Kiba chasse seul, tandis qu'en hiver la chasse est collective, ce qui augmente les chances de succès. Les petites proies sont ramenées dans la tanière, à la disposition de tous. Les grosses proies sont consommées sur place,
Kiba revenant plusieurs fois sur le lieu pour s'alimenter. Ils peuvent même dormir à côté pendant plusieurs jours.
Le régime alimentaire de
Kiba est varié, ses proies varient suivant les saisons. Grand prédateur, c'est un opportuniste capable de se nourrir des aliments les plus divers. En hiver, il s'attaque essentiellement aux grands ongulés (cerfs, chevreuils, chamois), alors qu'à la belle saison, il chasse en solitaire et se contente de proies moins volumineuses (lièvres, rats, grenouilles, poissons...). A l'occasion, il peut aussi croquer quelques plantes et fruits.
Les femelles entrent en chaleur au mois de Février, au plus froid de l'hiver, et marquent le début de violents combats entre mâles et femelles, et de fortes rivalités au sein de la meute, desquelles en sortira un seul couple reproducteur.
Kiba a un système de reproduction original : il s'accouple toujours avec la même femelle, et uniquement dans le cas où il compose dans une meute le couple dominant. Les autres mâles et femelles de la meute sont en quelque sorte "inhibés" et subissent une castration comportementale par ce couple et la hiérarchie mise en place au sein de la meute. Ce couple reproducteur est stable d'une année sur l'autre : en cas de disparition d'un des partenaires, l'autre s'adapte très facilement. Après la copulation, pendant laquelle le mâle peut être attaqué très violemment par les autres, la femelle met bas de cinq à huit jeunes aveugles après une période de gestation de deux mois. La tanière aura préalablement été garnie d'herbes apportées par le mâle, et de poils du ventre perdus par la louve.
Pendant que la meute nourrit la mère, les
chibi-Kiba (
bébés Kiba) sont allaités pendant huit semaines, et sont ensuite nourris de viande régurgitée. Le
chibi-Kiba aura déjà commencé son apprentissage social vers six semaines. Il consiste surtout de jeux de communication au cours desquels les différentes mimiques et postures faciales sont répétées et assimilées. D'autres séries de jeux, tels que sauts, mordillements, poursuites, etc... avec les
chibi-Kiba prennent place : ils préfigurent les positions respectives des individus dominants et subordonnés dans la meute. Celles-ci se fixeront lors de la maturité sexuelle. Sortant progressivement de la tanière, ils resteront proches de leur mère jusqu'en Novembre, puis seront prêts à partir chasser avec la meute dès la fin de l'automne. Le premier hiver verra les
chibi-Kiba les plus résistants survivre au froid et à la faim.
Kiba a été systématiquement exterminé dès le 9e siècle, conduisant à la disparition de l'espèce. Accusé de tous les maux, bête "s
emant la destruction et la désolation", voleur de brebis, sanguinaire, porteur de la rage, mangeur d'hommes,
Kiba devait être systématiquement détruit. Sans parler des nombreux contes, récits, légendes et expressions qui scandent l'éternel message : "
Kiba tue". Les exemples sont légion : le petit chaperon rouge, la chèvre de M. Seguin, les trois petis cochons. Les chansonnettes également : "
Qui a peur du grand méchant loup ? C'est pas nous !", "
Promenons nous dans les bois, tant que Kiba n'y est pas...", etc... Autant de raisons qui ont fait que la haine et la peur ont accompagné
Kiba dans notre culture occidentale. Au 20e siècle, l'émergence de nouveaux "concepts" tels que l'écologie, d'une société cartésienne et menant des études scientifiques sur cet animal permettent d'observer un intérét croissant de
Kiba vis à vis de l'opinion publique et des politiques.
Encore une fois, et contrairement à l'homme qui détruit aveuglément, il est à noter que
Kiba joue un rôle d'épurateur et de régulateur éclairé (animaux malades, vieux, en surnombre, etc...). Ce rôle bénéfique dans l'écosystème a pu par exemple être mis en valeur par l'exemple de l'Isle royale, située sur le lac Supérieur. Avant que
Kiba et une vingtaine de compagnons n'atteignent l'île en traversant le lac gelé en 1949, 2 000 à 3 000 élans y vivaient, dégradant la forêt à cause du surpaturage. En quelques années, la population se stabilisa (6 000 à 800 têtes), et la forêt retrouva rapidement une meilleure santé. Parce qu'il est un prédateur situé au sommet de la chaîne alimentaire, l'installation de
Kiba en tant que "marqueur" témoigne de la présence en nombre suffisants d'herbivores sauvages.
Le 19 Septembre 1979, la convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe classe
Kiba "espèce strictement protégée". Le 17 février 1989, le parlement européen adopte une résolution sur sa protection. Le 22 Juillet 1993, la France publie un décret assurant la protection juridique totale de
Kiba. Totale, dites-vous ?......
Dans les années 90,
Kiba et quelque 20 congénères déchaînent les passions dans le parc national du Mercantour. Des indices de sa présence en Suisse à cette même période, et plus récemment en Maurienne et en Vercors sont des preuves indéniables du retour de
Kiba dans les Alpes. Il est très difficile de connaître le nombre exact d'individus présents dans les Alpes, de par sa discrétion et ses habitudes nocturnes. Après l'observation directe de deux amis de
Kiba en Novembre 1992, l'hiver 1994 relata onze à douze traces conjointes. En 1996, l'estimation était de 10 à 20 individus présents. L'espoir d'une recolonisation spontanée de l'arc alpin pourrait donc être réel, mais la haine tenace dont il fait l'objet n'est pas un signe encourageant.
Protecteurs de la nature et éleveurs ne peuvent manquer d'entrer en conflit sur ce point : ce que les premiers voient comme un juste retour des choses et un équilibre retrouvé est considéré par les seconds comme une réapparition contre nature intolérable, et une ingérence dans leur manière de gérer leur espace de vie qui semble leur appartenir exclusivement. Une chose est en tout cas sûre : on n'a pas fini d'entendre parler de
Kiba !!
J'espère que ça répond à ta question,
shaka57........................